Lors de la deuxième journée du Forum foncier mondial, les membres de la Coalition internationale pour l’accès au foncier se sont réunis dans la Salle Plénière pour le début du Forum du réseau. Le premier orateur principal, Prafulla Samantara, qui dirige plusieurs mouvements de défense de l’environnement en Inde, s’est exprimé avec passion sur l’importance des droits fonciers, un « droit fondamental de tout citoyen dans le monde ». Il a fait ressortir que la population est souvent privée de ses droits fonciers par les grandes entreprises et les gouvernements désireux de tirer profit du foncier. Les droits fonciers doivent donc être établis, selon lui, avant l’arrivée des entreprises, et non rétroactivement. Il a plaidé en faveur d’une conception du développement protégeant les droits humains, par opposition à un développement visant uniquement des avantages économiques. Cependant, pour que les politiques publiques reflètent cette approche, la population locale doit s’opposer « fermement aux politiques de développement », ce qui signifie que les communautés locales doivent faire front commun pour « protéger la nature et l’humanité ». À cet égard, la terre, âme de la nature et base de la civilisation, doit être d’abord utilisée pour le bien de l’humanité. Elle ne saurait être utilisée en vue de développer des biens et services commerciaux.
Gillian Caldwell, la deuxième oratrice principale, a évoqué le travail que réalise son organisation, Global Witness, pour protéger les défenseurs des droits humains, la décrivant comme « une agence de détectives mondiale […] dévoilant les violations des droits humains et le non-respect de l’environnement par les industries agricoles et minières ». Elle a présenté trois études de cas : la première a porté sur le Nigeria, où des cadres de Shell ont été impliqués dans un vaste scandale de corruption, acheminant des fonds vers un blanchisseur d’argent connu et condamné, ce qui a eu des effets négatifs sur les personnes détenant des terres dans la région. Les responsables sont actuellement jugés en Italie.
Le deuxième cas concernait les barons du caoutchouc qui, financés par des banques et autres entreprises européennes, s’en sont pris violemment aux forêts et communautés du Cambodge et du Laos. Les pressions exercées par Global Witness sur ces établissements ont entraîné leur retrait du projet. Global Witness a également exhorté les acheteurs de caoutchouc de s’abstenir de s’approvisionner auprès des plantations présentées dans son enquête.
La troisième étude de cas a porté sur un projet de barrage hydroélectrique controversé au Honduras, où Global Witness a révélé que la personne à la tête du projet, David Castillo Mejia, avait des liens avec l’Armée. Il a ultérieurement été arrêté et inculpé pour avoir commandité le meurtre de la militante Berta Cáceres.
Gillian a indiqué que « alors que la ruée sur le foncier s’intensifie […] le nombre de cas à relater ne manque malheureusement pas ». Elle a souligné la nécessité de « placer les entreprises et les investisseurs face à leurs responsabilités pour leurs chaînes d’approvisionnement et leurs investissements, respectivement ». Elle a encouragé les délégués à « nous aider à mettre fin aux assassinats en lançant un appel aux gouvernements et aux entreprises lorsque surviennent des assassinats, et à « faire toute la lumière sur leur rôle ». Les entreprises doivent « respecter les communautés ».
Gillian a poursuivi en prétendant que « les lois [sur la réforme agraire] ne valent pas grand chose à moins qu’elles ne soient appliquées, et elles ne seront appliquées que si nous révélons les conséquences financières et en termes de réputation qui découlent de leur non-respect ».
Avant de conclure en montrant une émouvante vidéo dépeignant la violence à laquelle sont confrontés les défenseurs des droits fonciers, Gillian a encouragé les délégués à œuvrer « tous ensemble à un paysage plus juste ».